23/11/2018
_Vultures of the Void_
Vultures of the Void : A History of British Science Fiction Publishing, 1946-1956 : Philip HARBOTTLE & Stephen HOLLAND : 1992 : Borgo Press (série "I.O. Evans Studies in the Philosophy and Criticism of Literature" #13) : ISBN-10 0-89370-541-6 (la fiche ISDB du titre) : 128 pages (y compris index) : coûtait une vingtaine d'USD pour un tp avec quelques illustrations en n&b, à peu près introuvable à des prix décents (j'ai mis une dizaine d'années à m'en procurer un exemplaire), existe aussi en hc (-315-X), mon exemplaire étant probablement un tp relié artisanalement.
Comme expliqué d'une façon plus longue là, cet ouvrage est un titre mythique sur un sujet resté longtemps assez obscur y compris pour nos voisins britanniques eux-mêmes. A la lecture, je ne peux que confirmer ce statut. Pour l'époque (1992, je le rappelle), c'est un ouvrage qui faisait véritablement oeuvre de pionnier. A ce titre, et même si la version de 2011 est logiquement plus complète, il mérite une place dans toute bibliothèque de référence, ne serait-ce que pour l'exemple.
Note GHOR : 3 étoiles
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02/05/2016
_Index to Science Fiction Anthologies and Collections_
Index to Science Fiction Anthologies and Collections : William CONTENTO : 1978 : G. K. Hall & Co. : ISBN-10 0-8161-8092-X (la fiche ISFDB du titre) : xii+608 pages : coûtait 28 USD pour un hc grand format non illustré (et sans jaquette), se trouve maintenant d'occase pour presque rien au fur et mesure que des exemplaires sont mis au rebut par des bibliothèques américaines.
Pour les amateurs de musculation (le livre pèse presque 2 kilogrammes), les nostalgiques des compilateurs à cartes perforées (COBOL ou FORTRAN) et de l'écriture en MAJUSCULES, les gens capables de lire la codification MITSF dans le texte et pour qui des lignes comme "SON IS BORN, A SS ASF 46 05" ne présentent aucun mystère, cet ouvrage est un must. En terme de projet, c'est du classique puisque l'objectif de Contento est la recension des tous les recueils et anthologies parus en langue anglaise jusqu'en 1977 (ce qui représente plus de 2000 livres compilés).
La structure est celle d'une série d'index alphabétiques : 1) Index des titres des ouvrages, 2) Index des textes par auteur, 3) Index des titres de nouvelles et 4) Contenu détaillé des ouvrages listés. Comme on le voit aisément, même s'il lui est antérieur, ce volume est nettement plus pratique et complet que le Fletcher (évoqué ici). Le "Contento" est d'ailleurs, sous ses diverses formes (il existe un supplément papier pour la période 1977-1983 chez le même éditeur, puis il passera sur CD-ROM et ensuite sera accessible en ligne), toujours un des ouvrages de base de la bibliographie du genre. A ce titre et en cas de panne généralisée de l'internet, c'est un ouvrage à avoir dans toute bonne bibliothèque de référence (même s'il est complètement muet sur les éventuelles rééditions ou réimpressions, seules les EO étant renseignées).
Note GHOR : 3 étoiles
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28/12/2015
_Monsters, Mushroom Clouds, and the Cold War_
Monsters, Mushroom Clouds, and the Cold War : American Science Fiction and the Roots of Postmodernism, 1946-1964 : M. Keith BOOKER : 2001 : Greenwood Press (série Contributions to the Study of Science Fiction and Fantasy #95) : ISBN-10 0-313-31873-5 (la fiche ISFDB du titre) : 196 pages (y compris bibliographie et index) : coûtait une soixantaine d'USD pour un hc non illustré sans jaquette.
Cet ouvrage est une relative rareté dans le domaine de l'étude du genre dans le monde anglo-saxon. En effet, il s'agit, comme l'indique bien Booker (presseur d'anglais dans une université US et auteur de nombreux livres sur le genre) dans son introduction, d'une lecture politique des textes de la période et du lieu choisis (ici la science fiction américaine tous médias confondus des années 50, c'est à dire en pratique celle produite entre 1946 et 1964, les long 50s comme les désigne l'auteur). C'est dans cette période, sans doute un peu oppressante pour les citoyens américains, que certains acteurs de SF ont utilisé le genre comme moyen de critiquer discrètement (la SF étant vue comme négligeable) mais efficacement les orientations politiques de leur pays. A contrario, une autre frange du genre l'a utilisé pour renforcer les messages de l'establishment (ou du gouvernement ou du complexe militaro-industriel).
Après une longue introduction qui précise la démarche et les buts de l'auteur, l'ouvrage est divisé en quatre chapitres conséquents : 1) les romans de SF comme critique sociale, 2) les romans et films post-apocalyptiques, 3) les films d'exploration spatiale et d'invasions extraterrestres et 4) les films de monstres. Quelques pages de notes, une bibliographie des oeuvres citées et un index clôturent l'ouvrage.
La lecture de ce livre est fort rafraîchissante (pour un européen) car elle met en perspective de façon claire les enjeux politiques qui se cachent toujours (bien évidemment à des degrés divers) derrière les oeuvres de fiction. Et la SF des années 50 (surtout du côté cinématographique) est une telle mine de caricatures diverses et variées (la SF écrite étant visiblement plus critique) que les flèches décochées par Booker font mouche et provoquent un amusement certain. Cette ironie permanente (même si elle est mâtinée d'une certaine tendresse) est une des forces d'un livre qui témoigne aussi d'une grande connaissance du genre de la part de Booker.
Même si les séquences de Heinlein Bashing (sur The Puppet Masters) ou de Gunn Trashing (pour ses écrits sur Asimov) sont particulièrement jouissives, il serait erroné de réduire le livre à une série de tirs aux pigeons sur des cibles faciles (par exemple les films de monstres avec leur bestiaire géant). Booker montre bien l'éventail des positions au sein du genre (de la résistance à la collaboration avec l'orthodoxie ambiante) et la façon dont les messages étaient passés. Il montre aussi comment le postmodernisme fort à la mode actuellement était déjà en germe dans les années 50. Un livre finalement assez court (à peine 160 pages de texte) mais particulièrement dense et passionnant à lire.
Note GHOR : 3 étoiles
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20/03/2015
_Chaos Theory, Asimov's Foundations and Robots, and Herbert's Dune_
Chaos Theory, Asimov's Foundations and Robots, and Herbert's Dune : The Fractal Aesthetic of Epic Science Fiction : Donald E. PALUMBO : 2002 : Greenwood Press (série "Contributions to the study of science fiction and fantasy" #100) : ISBN-10 0-313-31189-7 : x+240 pages (y compris index et bibliographie) : coûtait 70 USD pour un hc non illustré sans jaquette (pour mon exemplaire) qui est l'un des titres les plus difficiles à trouver de la série.
Dans son introduction, Donald Palumbo (un universitaire que l'on connaît surtout comme co-responsable de la série d'ouvrages de référence édités par McFarland) évoque la constance de la popularité de deux des séries phares de la SF : l'ensemble Robots/Fondation d'Asimov et la séquence autour de Dune de Frank Herbert. Le nombre d'éditions différentes de ces ouvrages et leur disponibilité quasi-permanente (voir par exemple le succès de la reprise chez Denoël des Asimov) atteste bien de la fascination que continuent à exercer ces textes. Pourtant, leurs qualités intrinsèques peuvent parfois (surtout pour le bon docteur) laisser à désirer. La thèse que Palumbo défend dans cet ouvrage est que l'attrait de ces métaséries (c'est son terme) est lié aux choix des auteurs de créer des ensembles de textes s'inspirant des théories du chaos et de proposer des sortes d'oeuvres fractales. La reconnaissance et l'appéciation par les lecteurs de ces éléments mathématiques expliqueraient donc leur popularité constante au sein du monde des amateurs de SF dont on peut penser qu'ils seraient particulièrement réceptifs à une telle démarche.
Après une introduction qui se double d'une initiation à la théorie des fractales et à celle des systèmes chaotiques, l'ouvrage se divise en trois parties principales. La première est consacrée aux textes de la sous-série Fondation (en gros la trilogie initiale et les romans des années 50 situés dans l'empire de Trantor). La deuxième étudie les fictions relatives aux robots (nouvelles et romans autour d'E. Baley) puis s'élargit aux procédés d'intégration (essentiellement via plusieurs romans interstitiels) ayant permis à Asimov d'unifier son univers fictif dans les années 80 et 90. La dernière partie, un peu plus courte, se penche sur les textes d'Herbert de la série Dune principalement sous l'angle de leur utilisation du fameux monomythe de Campbell. Le tout dernier chapitre lui est d'ailleurs presque tout entier consacré par le biais d'une démonstration de sa nature intrinsèquement fractale. A noter que des parties du livre semblent avoir été précédemment publiées dans diverses revues d'études sur le genre (SFS, Foundation) et qu'une bibliographie sommaire et un index complètent l'ouvrage.
Cet ouvrage forme un ensemble assez jouissif à lire. Il est d'abord toujours agréable de retrouver le chaos et les fractales, symboles de la science mathématique des années 90, même si Palumbo (qui est un professeur d'anglais) tombe parfois dans l'erreur conceptuelle en mélangeant joyeusement les deux, en oubliant que le lien entre ces deux disciplines est plus de l'ordre de l'artefact de visualisation (certaines représentations d'attracteurs chaotiques dans l'espace des phases sont en effet des fractales) que d'une similarité philosophique (il n'y a rien de moins chaotique qu'une courbe de Koch). Voir Palumbo comparer diagrammes à l'appui la structure de la "multilogie" Robots/Empire/Fondation à un ensemble de Cantor (un objet mathématique célèbre que l'on retrouvera chez Egan par exemple) est un grand moment d'émerveillement qui force l'admiration. Sa démonstration de l'existence simultanée dans le corpus étudié d'une esthétique fractale où chaque séquence d'évènements est reproduite à des échelles variées (c'est le principe de l'auto-similarité à la base de la discipline), et d'une structure narrative basée sur la théorie du chaos (et donc de la dépendance forte aux conditions initiales) est un plaisir à lire et s'appuie sur une lecture extrêmement détaillée des textes de base qui, par exemple, pointe clairement chaque répétition d'un même motif (la victoire à la dernière minute, les fausses identités qui dissimulent d'autres fausses identités, etc.) même si celle-ci se fait à des niveaux différents de l'intrigue.
On pourra aussi sourire en voyant Palumbo se livrer à un grand jeu de réécriture de l'histoire (AMHA ben sûr) quand il implique que, dès l'écriture de la trilogie originale (fin des années 40), Asimov avait déjà fait le choix délibéré d'une esthétique fractale (alors que Mandelbrot finissait à peine ses études). On savait Asimov brillant (et lui-même l'a souvent dit), mais à ce point c'est un exploit, exploit que les éléments bio-bibliographiques existants ne corroborent pas (du moins à ma connaissance). Parfois, l'argumentation de Palumbo pourrait bien se retourner contre lui, tellement elle est précise. En effet, en décortiquant les mécanismes scénaristiques d'Asimov et en montrant qu'ils se réduisent à une poignée de concepts et de situations systématiquement réemployés, il pourrait laisser supposer un certain manque d'originalité. De même le chapitre 6 dévoile assez bien les bricolages auxquels a dû se livrer Asimov pour parvenir à sa grande unification, ce qui donne finalement plus l'impression d'être face à un ensemble conçu après coup qu'à une idée développée sur des décennies, ce qui va à l'encontre de la théorie de l'essayiste.
J'ai personnellement trouvé la partie consacrée à Herbert plus faible, le lien avec la théorie du chaos se limitant le plus souvent au fait que l'écologie est une science du chaos (ah bon !) et la fractalité étant un peu oubliée. Le fil conducteur y est le monomythe Campbellien qui est présenté à la fois comme structure épique universelle (une sorte de couteau suisse) et comme objet fractal. En tout cas, tout cela m'a paru assez vague dans son application à l'univers de Dune qui est pourtant étudié avec force détails. Le dernier chapitre sort lui presque complètement du sujet du livre (les références à la SF se faisant même extrêmement rares au fil de la lecture) et vire quelque peu au fumeux avec les micro trous noirs qui côtoient les avatars de Bouddha et les motifs celtiques. Malgré cette fin un peu faible, c'est un ouvrage avec lequel on vraiment envie de dialoguer (éventuellement en le réfutant) et qui peut même, de par son argumentation fouillée, éventuellement faire changer l'appréciation artistique d'un lecteur sur Asimov, Herbert et leurs oeuvres.
Note GHOR : 3 étoiles
17:39 | 17:39 | Etudes mono-auteur | Etudes mono-auteur | Lien permanent | Lien permanent | Commentaires (2) | Commentaires (2) | Tags : anglais, 3 étoiles | Tags : anglais, 3 étoiles
03/10/2014
_The Science Fiction of Cordwainer Smith_
The Science Fiction of Cordwainer Smith : Karen L. HELLEKSON : 2001 : McFarland : ISBN-10 0-7864-1149-X : vii+158 pages (y compris index) : coûtait 28.50 USD pour un tp non illustré.
Souvent présenté comme étant un auteur de SF "pour initiés", Cordwainer Smith (ou plus exactement Paul Myron Antony Linebarger) est certainement un des écrivains dont la renommée au sein du genre est la plus inversement proportionnelle à la production. Avec à peine un roman et trois dizaines de nouvelles (que l'on peut trouver rassemblés dans des intégrales en VF -chez PP ou Folio- ou en VO -chez NESFA-), il jouit d'une immense réputation parmi les amateurs. Paradoxalement, il existe peu d'études complètes (si ce n'est le très court Exploring Cordwainer Smith de Porter évoqué ici), c'est quasiment à la première "vraie" tentative que se livre Hellekson (à qui l'on doit d'ailleurs d'autres ouvrages de référence) en se basant sur son mémoire de maîtrise de 1991.
Après une courte note d'introduction, l'ouvrage est divisé en six parties d'une petite vingtaine de pages chacune. La première est une biographie de l'auteur, elle est suivie par une étude des quelques romans non-SF de l'auteur (de l'espionnage). Hellekson compare ensuite deux versions de Drunkboat (une nouvelle inspirée de Rimbaud) puis étudie dans la partie suivante les divisions de l'humanité créées par Smith. Les deux derniers chapitres traitent respectivement du roman Norstrilia et de diverses nouvelles. De nombreux appendices sont fournis (bibliographie secondaire, index, liste de manuscrits), le plus important étant un glossaire des très nombreux termes inventés par Smith dans ses textes de la série de l'Instrumentalité.
Même si la partie "analyse" est au final relativement réduite (puisque ne constituant qu'une grosse moitié du livre), le travail d'Hellekson est d'une grande qualité. Et ce d'autant plus qu'il s'appuie sur des sources (les propres manuscrits de Linebarger) jusqu'à présent inexploitées. La partie biographique est un plus important (même si elle aussi est sans doute trop courte) parce qu'elle permet de rendre un peu moins mystérieux un personnage sur lequel on a beaucoup supposé et beaucoup fantasmé (voir l'affaire Lindner qui resurgit encore parfois de nos jours comme avec la BD de Smolderen et Clerisse).
Même si on aurait peut-être sans doute pu préférer qu'Hellekson développe d'autres aspects (l'exacte participation de la femme de Smith dans certaines oeuvres tardives) ou en réduise certains (le glossaire qui n'apporte rien de plus que celui de Lewis - évoqué ici - ou la partie consacrée aux textes mainstream de Smith), les analyses d'Hellekson sont très pertinentes et surtout factuellement très argumentées. Tout cela nous replonge avec délice dans l'univers si particulier de Smith, ce qui est, à mon sens, une réussite. En fait, on regrettera tout simplement (comme je l'ai déjà dit) que le livre ne soit pas plus long puisque seuls quelques textes sont vraiment abordés en profondeur et que la tapisserie que forme l'oeuvre de Smith n'est que survolée.
Note GHOR : 3 étoiles
13:30 | 13:30 | Etudes mono-auteur | Etudes mono-auteur | Lien permanent | Lien permanent | Commentaires (0) | Commentaires (0) | Tags : anglais, 3 étoiles | Tags : anglais, 3 étoiles